25 octobre 2012- Gatton paradise

Publié le par bistrip

Après un petit bafouillage, j'ai publié la première version de mon article alors que j'avais demandé à Clémence de

bien vouloir lire mon article et d'y apporter sa touche perso, cette demoiselle ayant des qualités et un savoir faire dans le domaine. Et j'avoue que les améliorations sont notables donc j'ai décidé de publier l'article à nouveau version remasterisée!

 

Deuxième faux départ… Je n’arrive pas à quitter Gatton, ce n’est pas l’envie qui m’en manque mais il y a comme quelque chose d’inachevé ici. Je hante l’endroit tel une ame en peine cherchant à comprendre ce qui me retient en ce lieu. Cette chose, c’est l’article sur lequel je planche depuis des jours au sujet de cette ville mais  je ne sais comment l’aborder. On n’est pas loin du journalisme d’investigation !

En cette veille de troisième tentative de départ la révélation tant attendue est enfin arrivee (merci Igor), Désormais il ne me reste plus qu’à pianoter sur mon clavier, la délivrance est proche.

Je vais donc vous conter l’histoire d’un lieu improbable, l’histoire de la vie de travailleurs immigrés dans la ville de Gatton, Queensland, Australia.

Tout d’abord resituons le contexte. Après un arrêt de quelques jours à Toowoomba, accueilli par Kurt suite à notre rencontre dans un pub au milieu de nulle part, il est temps de se préoccuper de trouver du travail. C’est ainsi que  je décide me diriger vers Gatton en compagnie de Clémence, stéphanoise rencontrée à Brisbane qui m’a rejoint chez Kurt.

Pourquoi Gatton ? Car sur ma route vers l’ouest pour trouver du travail, tous les locaux m’ont conseillé d’aller dans cette ville située au cœur de la lokyer valley, immense plaine maraichère : « Demain, tu seras dans un champ à cueillir des oignons… », Dis comme ca, ca ne fais pas vraiment rêver mais il n’est plus question de faire sa mijaurée, il est temps de bosser !

Nous voilà donc face au caravan park de Gatton, l’Australien qui nous a pris en stop savait exactement où nous déposer comme si le caravan park était un refuge pour backpackers égarés. Pas grand-chose aux alentours, nous nous avançons au milieu d’un champ de caravanes et de préfabriqués plutôt fatigués, Nous nous presentons a l’accueil. FERME.A peine 2 h de l’après-midi a ma montre, ça commence bien ! On jette un œil aux horaires d’ouvertures. C’est a en faire pâlir de jalousie n’importe quelle administration française 8-10h, 16h-18h. Mais miracle, elan de gentillesse ou excès de zèle, on nous ouvre tout de même les portes pour s’enregistrer…

 

Accueil glacial. Le minimum pour une  location est d’une semaine : 75 dollars par personne, payable d’avance, non-remboursable. On nous demande un obscur 10 dollars par personne pour les frais de dossier. Nous apprendrons plus tard que c’est ce qu’ils facturent quand on les fait travailler hors des heures ouvrables, c’est-à-dire les 3 quarts de la journée. S’en suit une interminable énumération des règles encadrants notre séjour, finalisee par la signature de leur règlement intérieur abusif. Mais la touche finale, incroyable coup de genie, revenant à une veritable privation de droit, à une émasculation de voyageur, une muselière pour backpacker est tout bonnement la prise en otage de notre passeport ! Restitue à condition d’avoir été de dociles backpackers et d’avoir paye sans sourciller  les innombrables frais non justifies  qui s’ajoutent a notre facture au fur et mesure du séjour. Ils s’assurent ainsi notre impossibilité a contester quoi que ce soit. Malheureusement dans notre situation, nous n’avions plus d’autres choix que d’accepter.

Il est temps de nous rendre à notre caravane, bien évidemment, a nous le droit de la trouver !

 Nous traversons donc ce petit village de caravane, rythme par l’arrivee fracassante des trains de marchandises et du bruit continue des voitures d’un axe de circulation majeur.

Venant des quatre coins du monde, la population ne depasse pas la trentaine. On y trouve des caravanes de toutes les tailles, plus ou moins accueillantes. Selon les locataires, le mobilier extérieur va de de la cagette en  plastique aux fauteuils de récup’, tables, chaises et même petit potager. Quatre allées plus tard et quelques aller-retour perdus dans ces caravanes, nous voilà enfin face à la 112. Elle n’a pas du bouger depuis des siecles : l’attache remorque est bouffée par la rouille et les pneus dégonflés reposent sur des parpaings. La roulotte ne fait pas plus de 5 mètres de long. Nous constatons que nous avons tout de même la chance de posséder une avancée avec un toit offrant un peu d’ombre, vitale dans cette région.

 Nous ouvrons la porte marquée des stigmates d’une entrée forcée. L’amenagement intérieur est minimaliste : une table a notre gauche entourée de deux banquettes accueillant difficilement 4 personnes, une allée centrale servant de cuisine, et un lit au bout à droite… bon on va vivre un peu serré mais ça devrait le faire.



Voilà pour notre arrive dans ce lieu où nous ne réalisons pas encore qu’on y a signe notre perte mais nous sommes bien décidé à travailler le plus possible ! Moi car je vois fondre comme neige au soleil mes derniers deniers et Clémence, elle, n’a plus beaucoup de temps pour s’acquitter des 88 jours obligatoires de travail dans l’agriculture, unique sésame pour obtenir un 2nd visa en Australie.

Pour vous faire une image plus précise de Gatton et vous en expliquer les tenants et aboutissants, je ne me contenterai pas de vous conter uniquement mon histoire mais de l’entrecouper de celle de différents protagonistes. Je vais donc vous présenter la journée type d’Igor et Rachid, caravane 121, 10 mois passés en Australie, s’étant rencontrés a Sydney et qui ont décide  d’accomplir ensemble leur travail en ferme pour leur second visa ; celle de Jérémy, Florent et Antoine, caravane 103, amis d’enfance, prets à économiser pour s’offrir leur voyage en Inde ; et bien sur celle de la caravane 112, occupée par Clémence et moi-même

3h45 AM : la caravane 121 est la première à s’agiter, Igor et Rachid s’extirpent difficilement de leur lit. Les courbatures sont toujours présentes, mais plus que le corps qui désormais c’est habitué à la dureté du travail répétitif, c’est l’esprit qui souffre. Mais ils n’ont plus le choix, il ne leur reste plus beaucoup de temps pour obtenir leur second visa et ils sont proches du but, plus qu’une vingtaine de jours.

4h AM : réveil glacial ce matin encore a la 112. Ayant refuse de payer par principe les 5 dollars de location pour une couverture, Clémence et moi-même partageons mon sac de couchage. Seulement, il ne suffit pas à affronter des nuits aussi froides que les journées sont chaudes. Comme tous les matins Clémence se lève la première, sans convictions aucunes, mais il est temps de se préparer pour une journée de travail bien que nous sachions que d’ici une heure nous serons recouches.

4h20AM : c’est à mon tour de me lever… 20 minutes de différence ? C’est que j’ai juste a enfilé mon petit déjeuner et mes habits de travail, attrapé mon jerricane d’eau et mon lunch tandis que Clémence se pare de son short le plus court et se maquille, non pas qu’elle soit superficielle mais il s’agit de la tenue officielle de la cueilleuse de broccolis qui veut travailler !  (et elle se shoot de café, alors que je n’en bois quasiment plus)

4h30AM : Rachid et Igor se présentent devant le caravane park où leur contractor (sous-traitant employant la main d’œuvre travaillant dans les champs) viendra les chercher d’une minute à l’autre pour une nouvelle journée de coupe de céleri. Ils ont eu la « chance » de le rencontrer pour leur  premier jour alors que celui-ci manquait de main d’œuvre.

4h40AM : caravane 103.Les lumières s’allument, ce matin sous l’impulsion d’Antoine. Les 3 compères se préparent à aller travailler, ils enfilent les mêmes vêtements comme tous les matins. Malgré leur présence depuis plus de 2 mois ils ne sont pas sur que leur contractor Steeven les reconnaissent si ils changent d’habits.

4h45 AM : Nous arrivons à  notre tour devant le caravan park. Déjà quelques personnes sont présentent. Certaines, comme Igor et Rachid attendent leur contractors, d’autres comme nous, sont venus tapiner de bon matin à l’affût du moindre van qui pourrait avoir besoin de personnes en plus.

5h AM. Antoine, Jérémy et Florent arrivent juste à temps pour le grand marché aux esclaves ! C’est l’heure pour Steeven, le plus gros contractors de la vallée, de venir faire ses courses. Aidé de ses conducteurs de tracteurs, ils viennent choisir ceux qui monteront dans les vans aujourd’hui pour une destination, une tache et un salaire inconnu. Ils ont l’embarras du choix !  4 vans soit environ une quarantaine de places pour plus d’une soixantaine de personnes. C’est parti pour un choix plus ou moins aléatoire :

Dans les plus :

- cela fait plusieurs semaines ou mois que vous êtes là et vous avez déjà travaillé pour lui (et vous n’avez pas eu la mauvaise idée de changer de fringues) 

- Vous êtes une fille et vous avez mis vos plus beaux atouts en valeur : décolleté plongeant et mini short. Ainsi le chauffeur de tracteur, cet enfoire, aura le plaisir de bien vous mater  du haut de son poste de travail (en meme temps, je serai une fille, je ferai pareil )

-  si vous achetez votre weed auprès de Steeven, c’est pas le tout mais pour le payer il faut bien gagner de l’argent  et donc travailler pour lui !

Moins : vous êtes le gars juste en face de lui dont il semble voir à travers…Bref, vous n’existez pas  (je vous laisse deviner dans quelle catégorie je suis).

 

5h02 AM. Les conducteurs defilent dans les allées de backpackers pointant du doigt ceux autorisés à monter dans le van. Trois personnes côte à côte : toi, toi, non pas toi j’aime pas ta gueule… (Ceci est une traduction de langage corporel, en vrai ils ne décochent pas un mot). Pour résumer, une armée de gonzesses ( en minishort) et d’asiatiques montent à bord.

5h05, un des conducteurs se dirige vers Jérémy, Florent et Antoine : il ne reste plus qu’une place mais puisque désormais se sont des vétérans, il les laisse choisir. Alors qui ira travailler aujourd’hui et qui ira se recoucher ? Vote à l’unanimité, c’est au tour d’Antoine, c’était lui le motivé ce matin !

Une fois de plus avec Clémence nous avons fait le trottoir pour rien… Certainement plus dur à encaisser pour elle que pour moi. Le fait qu’ils ne soient pas sensibles à mes charmes n’a rien d’étonnant mais qu’il la laisse plante là alors qu’elle s’est faite toute belle rien que pour eux est une autre histoire. Pourtant, c’est elle qui  avait les plus belles jambes de tout le parking J

Nous avons vraiment l’impression d’être des clandestins mexicains ayant traversé la frontière américano-mexicaine dans l’espoir de trouver du travail.

Antoine était le dernier à embarquer, le marché est fini pour aujourd’hui.

5h30 AM. Troisième cigarette de la journée, désormais nous sommes levés et réveillés sans aucune envie d’aller se recoucher. Débriefing, rires nerveux, ca papote sur le trottoir et puis on ne sait jamais, peut-être que quelqu’un aura besoin de main d’œuvre supplémentaire… il sait où nous trouver !

5h45, On abandonne pour aujourd’hui, nous laissons derrière nous quelques vaillants bien décidés à travailler coûte que coûte. Ils seront peut-être embauches par des contractors pour les oignons de printemps soit quelques heures de travail pour 21 dollars tout au plus.

6h AM.Tandis qu’Antoine arrive enfin (plus d’une heure de route) sur un champ de broccolis pour une journée de travail plutôt tranquille car payé à l’heure, Florent a déjà replonge dans les bras de Morphée.

7h20 AM. Premier film de la journée terminé, c’est la première fois que je termine un film si tôt le matin… il ne reste plus qu’à m’occuper pour les 14 prochaines heures.

7h30, Jérémy qui s’ennuie sec, décide de pratiquer l’activité principale du caravan park, faire le tour du voisinage. Il se rend donc à la 112 où il est sur de trouver ses voisins. Avec une journée et demie de travail en une semaine, c’est rare qu’ils soient absents.

9hAM. Voilà 4 heures que Rachid et Igor travaillent non-stop. Les pauses légales toutes les deux heures se sont pour les gens qui ont des droits, pas pour les backpackers !  Le soleil qui les accable, la chaleur étouffante et cela  sans un moment de repis, c’est supportable. Mais les remarques incessantes, le manque d’humanité de leur employeur concourant pour le meilleur esclavagiste de l’année rongent leur patience comme le soleil tanne leur peau, de façon continue et implacable. Ouf, le tracteur part changer de remorque, pas le temps pour une cigarette mais juste assez pour enfilé un sandwich en 5-5 et se rafraichir.

??? Installé sur le perron de la caravane 112, mal assis sur des cagettes en plastiques récupérées près de l’entrée de service d’un supermarché, Clémence, Jérémy et moi-même ont perdu toute notion de temps. Voilà des heures que nous buvons des litres de cafés, fumons cigarettes sur cigarettes, et discutons  de notre futur, notre présent et nos vies passées. Avec clem, on imagine l’effet que ca doit faire de monter à bord d’un van pour aller travailler.

12 h PM Antoine rentre du travail. 2 heures de trajet pour 5 heures de travail, petite journée, ca payera a peine la weed…

12h39PM.Après avoir mangé mon lunch (préparé la veille),  comme tous les jours, je décide d’aller faire un tour à la 103, laissant Clémence a ses recherches d’emploi sur internet. Elle possède un objet qui fait  rêver tous les  backpackers : une clé internet 4G. Ainsi, elle n’a pas besoin de courir au Mac Do ou autre internet café. Avec cet atout indéniable, un peu de volonté et beaucoup de patience, elle finira finalement par trouver un travail de ferme et quitter cet endroit qui ne veut pas d’elle (et de moi non plus d’ailleurs)

13h07PM : Rachid et Igor rentrent enfin de leur journée de labeur. Comme tous les jours ils sont venus à bout de leurs 16 palettes de céleris, ce chiffre ne varie jamais, et donc l’argent qu’ils peuvent gagner non plus (sauf si il y a un absent dans l’équipe), La seule chose qui change c’est le temps passé au champ et donc le salaire horaire qui oscille entre 8 et 14 dollars soit le salaire minimum légale en Australie.

13h09PM. Ces messieurs passent voir leurs voisins les plus proches, il n’y a que Clem de présente, leur voisine préférée. C’est l’heure du débriefing de leur matinée de travail, permettant presque de se réjouir de ne pas avoir travaille.

13h26, Rachid et Igor sont prêt à aller à se doucher… quel besoin ont-ils à y aller tous ensembles ? Ah oui, les douches sont payantes dans ce caravan park, 50 centimes pour 4mn. Certains trouvent ça trop court mais pour eux c’est juste assez pour se relier. Lorsque l’on est pauvre, chaque centime compte ! Ils pourraient faire comme moi : se doucher jusqu’à je  m’insupporte moi-même (soit au bout d’environ 3 jours) ou que Clem me force a y aller ! Mais je ne travaille pas, eux oui et l’odeur de céleri n’est pas un parfum des plus agréables.

13h30, Cours quotidien de jeu de cartes à la 103, toujours assis sur des cagettes plastiques. Après avoir appris à mes 3 nouveaux camarades, le wist et la belote, je passe aux choses sérieuses, bien décidé à leur apprendre la coinche… après plus d’un an de voyage, cela me manque et avec tout ce temps à notre disposition, je compte bien faire une vraie partie avant de partir de Gatton.

13h37, Le proprio passe à nouveau la tondeuse bien qu’il n’y ait rien à tondre si ce n’est les vêtements tombés de l’étendage (le seul autorisé. Interdit d’étendre ses vêtements avec des cordes autour de sa caravane). Celui-ci passe ainsi avec un grand sourire, le cul vissé sur sa tondeuse automotrice, projetant la poussière dans les caravanes et directement sur nous… reste plus qu’à nous enfermer dans le four que sont les caravanes à cette heure-ci de la journée.

14h, Jérémy allume le premier joint de la journée, le premier d’une longue serie. Il a fait preuve d’une grande volonté  pour ne pas le faire avant. Car quel meilleur compagnon que la marijuana face a l’ennui, ci ce n’est l’alcool mais c’est encore un peu tôt pour l’apero.

???, Clémence passe à la 103, histoire de fumer sa cigarette avec un peu de compagnie. Compagnie presentant tous les signes de la defonce : yeux rouges, rires stupides, difficultes a s’exprimer. L’herbe australienne s’est révèle être excellente, je vous la conseille

??? (Il doit être le milieu de l’après-midi vu comme le soleil tape quand on sort de son coin d’ombre). Second débriefing de la journée pour Rachid et Igor, cette fois auprès de la 103. Je me renforce dans mon idée de partir.

 

15h78,  A la 103, ça se bouscule, difficile de trouver une caisse de libre, reste plus qu’à s’assoir par terre. Des voisins et collègues de travail de toutes nationalités défilent, c’est le moment pour mes camarades à l’anglais approximatif de faire un petit effort. Il faut dire que je suis bilingual J pff…

 Mais le français reste la langue officielle dans les parages, la communauté française se retrouvant au sein de cette caravane. Ainsi Jules et Carine, anciens résidents du caravan park, viennent désormais en simple visiteur. Cela fait des mois qu’ils sont à Gatton, pour eux pas de difficultés à travailler, ils gagnent leur vie à peu près normalement et ont trouvé une maison qu’il partage avec 8 autres personnes. Ca ne leur coute pas moins cher mais cela leur permet de retourner à une vie un peu plus normale et retrouver un peu de liberté.

Les joints et les douilles tournent à tout va, l’ensemble du caravan park semble être anesthésie par la weed mis en circulation par les locaux.

On  parle alors principalement boulot, on essaye de se refiler les plans pour bosser, et de faire croquer du travail aux autres. Certains reviennent de la cueillette d’oignons, à genoux toute la journée pour 40 dollars, un travail digne de ce nom semble une hérésie. On evoque aussi les rumeurs et les histoires glauques au sujet des pratiques abusives de certains fermiers ou contractors comme les faveurs sexuelles qu’ils s’offrent aupres des backpackeuses ( voir backpackeurs) en echange de meilleurs conditions de travail… si seulement 20% de ces histoires sont vraies, il y a de quoi être inquiet et ce qui est sur c’est que je ne mettrai jamais les pieds à Ayr pour chercher du travail.

16h PM. C’est l’heure du french market… pour ceci, il vous faut un grand sac à main ou bien un sac à dos et c’est parti pour un petit tour au Coles, l’un des supermarchés local. Comme toujours pour y acheter les mêmes produits, ceux de premières nécessités, encore a peu près abordables : pain de mie, riz, pates , noodles….Le french market ou comment rentrer à la maison avec des produits que ne l’ont peut pas s’offrir avec un salaire inférieur au minimum légal, comme la viande, le jambon ou bien les petits plaisirs qui permettent de ne pas tomber en dépression totale : nutella, chocolat, camembert. Ainsi des gens qui n’avaient jamais rien volé auparavant arrivent à un vol systématique des supermarchés bien aidé par la naïveté touchante des australiens et un système de gestion des stocks qui doit encore se faire au boulier.

Pendant ce temps, je suis en route avec Clémence pour aller chercher le salaire de notre première journée de travail, il y a une semaine de cela. Après avoir traversée toute la ville à pied, nous voilà à l’adresse indiquée, une maison tout ce qu’il y a de plus commun. Nous sonnons à la porte, un peu inquiet que l’on se soit foutu de nous et que nous ne soyons jamais payés. C’est bon nous sommes à la bonne adresse, nous rentrons alors dans une pièce immense où se trouve le contractor indien installé derrière son bureau… j’ai l’impression de rencontrer un parrain de la pègre. Nous sommes bien dans ses petits papiers, il sort alors une liasse de billet du meuble derrière lui et ses mains ornees de nombreuses bagues en or retirent les quelques billets composant mon maigre salaire.70 dollars pour 10 heures de travail. Je ne sais pas si je dois lui dire merci ou bien lui cracher au visage (et bien sur je ne suis pas déclaré et Clémence non-plus… cela risque difficile pour elle d’obtenir le 2nd visa si elle se fait payer au black)

17h24, Sur la route du retour vers le caravan park, la diligence française se sépare. Jérémy, Antoine et Florent vont faire un tour à l’une des nombreuses églises de Gatton… l’Australie leur aurait-il donné la foi ? Non, c’est juste qu’aujourd’hui il y a internet pour 1 dollar et avec cela on a même le droit à un sandwich ! Le reste de la troupe continue sa route marchant tranquillement sur le bord de la route, le conducteur d’un premier 4x4 se met à nous aboyer quelque chose d’incompréhensible mais vu son visage plein d’agressivité on se doute que ne se sont pas des mots de bienvenus et d’encouragements. Et voilà qu’un peu plus loin, re-belote… Pour la première fois de ma vie, je suis victime de discrimination, comme quoi la couleur de peau ou bien la religion ne sont pas les seules prétextes du racisme, voilà que certains australiens ont inventés le racisme anti-backpackers !

18h16, C’est l’heure du diner. Nous invitons nos voisins de la 121 a diner chez eux, et oui notre caravane est trop petite pour pouvoir manger à 4. Nous profitons de leur caravane « grand luxe » avec banquette en sky pour se faire une bouffe.

19h14, il est temps de préparer la journée de demain, c’est-à-dire les déjeunés et remplir les bouteilles d’eau.

19h37, Retour à « l’alliance française » caravane 103, pour un dernier verre, ou un dernier joint (ou bien les deux).

21h. C’’est l’heure du couvre feu, le son des claquettes de la patrouille résonne dans les allées. Désormais c’est chacun chez sois.Les visiteurs du caravan park ont tout intérêt à être parti, mieux vaut ne pas se frotter à cette patrouille armée de ses féroces caniches (ou peut-être bichons nains… je ne suis pas un expert canin). Nous avons quand même l’autorisation de nous réfugier à l’intérieur des caravanes et de garder les lumières allumées.

 

 

21h02, Rachid et Igor vont se coucher, demain encore se répétera le cercle infernal.

21h37. Je souhaite bonne nuit à tout le monde et retourne à ma caravane où je sais que j’aurais du mal à trouver le sommeil… c’est ça de ne rien faire de ses journées.

Décrite ainsi, une journée à Gatton semble bien remplie, mais ne vous y trompez pas, la constante est de regarder le temps qui passe, c’est pour cela que la consommation d’herbe y est si importante. Les backpackers deviennent alors plus qu’une simple main d’œuvre bon marche, ils deviennent aussi un revenu, un moyen de s’enrichir sur le dos de ces jeunes voyageurs, et ce sans limites. Comme les propriétaires du caravan park qui louent des caravanes pourris au pris d’une chambre de bonne en plein Paris (en France ils seraient consideres comme des marchand de sommeil). Ou encore, les contractors qui pour la promesse d’une 2ème année de visa mettent de côté la législation du travail australienne, voir même la loi en leur fournissant la marijuana leur permettant d’accepter d’être coincé ici et rallongeant d’autant plus leur séjour,  faute de pouvoir économiser de l’argent pour partir.

Gatton devient alors l’exemple parfait de l’abus d’une génération sacrifié, dans l’impossibilte de trouver un boulot dans leur pays avec un salaire décent. Des milliers de jeunes gens viennent tenter leur chance de l’autre côté du globe mais cela ne dure qu’un an à moins que vous fassiez vos 3 mois de ferme mais alors dans ce cas un conseil : ne vous y prenez pas au dernier moment afin d’avoir la possibilité de dire non.

Dans mon cas, quelques jours plus tard, nous avons éteints le réveil, à quoi bon se lever pour retourner se coucher ! Et même si par chance nous réussissions à travailler une journée, nous aurions du attendre une semaine de plus, le temps de se faire payer le vendredi suivant. Avec Clémence nous fûmes donc les seuls backpackers restant à Gatton pour les vacances, permettant ainsi a mon pied de cicatriser et a Clémence de trouver enfin du travail sur internet pour que je puisse reprendre ma route. N’ayant plus de caravane, j’ai même réussi à empirer mon status social : de simple travailleur immigré, je suis passe au à clandestin dans le caravan park pour mes deux derniers jours. Malgre tout, je ne regrette pas cet arrêt qui bien qu’il ne m’ait pas rapporté un sous, m’a permis de  rencontrer des gens qui vont me manquer et désormais je ne peux que trouver mieux que Gatton.

NB : Dernière chose pour tous ceux qui taperai dans un moteur de recherche : Gatton job picking caravan park, et bien entendu parlant français, prenez le temps de lire cet article avant de vous y rendre !

 

 

 

Publié dans Australie - Queensland

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